Pierre Ier
dit Pierre le Grand

Tsar et Empereur
de Russie
Règne de 1682 à 1725


LA JEUNESSE DE PIERRE

Il semble que malgré les légendes qui en firent un surhomme dès sa naissance, Pierre Aléxéïévitch fut lent à se développer. A trois ans, il avait encore une nourrice et à 11 ans il ne connaissait que les rudiments de lecture et d'écriture. A 16 ans, d'après ses cahiers d'études, il écrit très mal et a une orthographe lamentable qu'il conservera toute sa vie. 

Eduqué par un diacre à peine lettré et alcoolique (Nikita Zotof), il est adoré par sa mère Natalia Narychkina. Ayant été elle-même éduquée d'une façon plus occidentale que les femmes russes de l'époque, elle laissera Pierre grandir en toute liberté et fréquenter tout ce qui pouvait trancher avec la rigueur de la cour du Kremlin . 

En cette fin XVIIe, la ségrégation des étrangers à Moscou était très forte.  Sous l'influence de l'Eglise russe qui refusait de voir s'ouvrir des églises catholiques et des temples protestants, le tsar Alexis avait interdit en 1652 aux étrangers d'habiter à l'intérieur de Moscou et de porter le costume russe afin de les différencier clairement dans la foule des moscovites.
 
Le Faubourg des étrangers
Gravure du XVIIIe 
Ainsi naquitce faubourg : Nèmetskaïa Sloboda, que l'on traduit par "faubourg allemand" sans doute un peu hâtivement. Le mot Niémoï,  signifiant muet, ce terme s'applique à tous les étrangers "muets"car ne parlant pas le russe : anglais, suisses, hollandais ou polonais. Paradoxalement on traduit encore de nos jours la "langue allemande" par "niémétski iaziïk" : la langue des muets...

Pierre fuit d'abord le Kremlin, puis la résidence forcée de Préobrajenskoïé, et  court le "faubourg allemand" (et ses tavernes), fréquente les étrangers dont il admire les connaissances et se lie d'amitié aussi bien avec le palefrenier Boukhvostov, le géomètre hollandais Frantz Timmermann, qu'avec l'irlandais Patrick Gordon, général-major dans l'armée russe, catholique, ou l'aventurier suisse d'origine italienne François Lefort, calviniste.
 
François Lefort
 
Patrick Gordon

Le jeune tsar envoie chercher des montres dans les réserves du Kremlin, pour pouvoir en démonter le mécanisme. A 12 ansil se passionne pour un instrument ramené par le prince Dolgorouki: l'astrobale! Une délégation revenant de France lui en apporte un. Il se fait expliquer son fonctionnement par Timmermann qui deviendrason professeur de mathématiques. Il récolte un peu au hasardde ses rencontres une quantité d'informations, de connaissances surles sujets les plus divers, sans ordre ni logique, sans parfois d'approfondissement, mais sa soif de savoir en est étanchée.

Il formera également ce qu'on qualifiera d' "Ancêtre de la marine russe" en réparant unvieux bateau trouvé dans le hangar d'un oncle au village d'Ismaïlov. A bord de cette "barque", il apprendra les rudiments de la navigation sur un étang. Apparaissent ainsi deux autres "précepteurs", des charpentiers de marine : Karscheten-Brandt et Kort qui l'initieront àl'art de la navigation sur le lac de Péréïaslav.

Pierre forme également une petite troupe de joyeux drilles (les "potechny" : les "amuseurs") comme lui etpourtant s'entraîne à des manoeuvres militaires.
A l'approche de ses 17 ans, Pierre est ainsi à la tête d'une troupe de plus d'une centaine de jeunes gens, vêtus d'uniformes étrangers récoltés çà et là au hasard des opportunités du "Faubourg des étrangers". Le besoin de guerriers pour son armée transformera bientôt Préobrajenskoïé en véritable bureau de recrutement qui verra arriver tous les mécontents de la régence.


Si tous ces exercices physiques fortifie le corps de Pierre, d'autres fréquentations lui apprendront l'alcool et les femmes...
Il passe ses soirées etses nuits à boire avec ses amis dans des tavernes où il rencontre des compagnes d'une nuit ou de quelques jours.
Il se lie d'amitié aussi bien avec des fils de boyards que des palefreniers, des valets et des gamins du village. C'est ainsi qu'il rencontrera un vendeur de pirojki (petits pâtés de viande) dont il fit son compagnon préféré (sans doute même son mignon) avant d'en faire un prince de l'empire russe : Alexandre Menchikov.


(Ci-contre : Portrait de Menchikov)

Il rassure ainsi sa soeur la Régente Sophie qui le laisse jouer à la "guéguerre", en revanche il inquiète sa mère. Elle comprend un peu tard le danger des fréquentations libres de Pierre. Elle décide alors d'appliquer le dicton russe : "Se marier, c'est changer"... Le 27 janvier 1689, Pierre à 17 ans épouse Evdokia Lopoukhina (Eudoxie)  mais trois mois après son mariage il est déjà reparti naviguer. Il trompera sa jeune épouse qu'il trouvait trop pleurnicharde et dévote, avec (entre autres) Anna Mons, ancienne maîtresse de Lefort et de Menchikov, fille d'un tavernier allemand, surnommée "kokouïi tsarina" ou en d'autres termes : "la reine des lupanars"...


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©Marie Deriglazoff-2012