SAINT GUÉNNOLÉ
Abbé et Confesseur 16/03 - 03/03 |
Guénnolè,
dont le nom latin Winwaloeus a été traduit de bien des manières,
Gwennolé, Guingalois, etc., eut pour père Fracan et pour
mère Alba (ou Guen), appartenant tous deux à de nobles familles
de la Grande-Bretagne. Il eut pour frères deux jumeaux Guetbenoc
et Jacut, nés vers 460, avant l'émigration de la famille
en Armorique. Guénnolé, plus jeune qu'eux, naquit sur la
rivière de Gouet, à quelque distance de la mer, en un lieu
qui reçut plus tard le nom de Plou-fragan. Lorsque Guénnolé
commença à parler, on lui fit contracter l'habitude de redire
les louanges de Dieu. Il fut confié aux soins d'un père spirituel
qui devait former son âme par l'enseignement des saintes lettres.
Son père aurait bien voulu le préparer à vivre dans
le monde, mais un jour qu'il gardait ses troupeaux, le Seigneur lui apparut
au milieu d'un orage, et Fracan tombant à demi-mort se souvint plus
tard d'avoir fait cette offrande : "Seigneur Dieu tout-puissant, toutes
les créatures sont entre vos mains. Je vous consacre volontiers
ce Guénnolé qui est bien plus votre fils que le mien, car
vous me le demandez. Et même je vous donnerai les deux autres qui
sont frères jumeaux. »
Rentré dans sa demeure, Fracan raconta à son épouse ce qui venait de se passer. Sept jours après, ils allaient tous deux présenter le jeune enfant au saint homme Budoc, regardé alors dans la contrée comme la "colonne de l'Eglise". Budoc que l'on surnommait le docteur très élevé, avait fondé un monastère sur un îlot voisin de l'île de Bréhat; ce monastère était connu sous le nom d'île Lavée (Laurea, aujourd'hui Lavret). Les saints voyageurs avant d'arriver, furent assaillis par une violente tempête ce fut l'enfant qui rassura ses parents en leur suggérant les salutaires pensées de la foi et de l'abandon à la divine Providence. Fracan, arrivé auprès de Budoc, lui exposa le but de son voyage en même temps que l'incident de la tempête à laquelle il venait d'échapper. Le saint homme, en recevant l'enfant, fit connaître aux parents ce qu'il en augurait dès le lendemain, Fracan après avoir reçu la bénédiction de Budoc rentrait à sa maison tandis que Guénnolé demeurait au monastère. L'enfant fit de rapides progrès sous
l'habile direction de Budoc, et bientôt Dieu lui communiqua le don
de faire des miracles. Un jour que Budoc était allé en quelque
pieux pèlerinage, après avoir recommandé à
ses disciples de la modération dans leurs jeux, l'un d'eux tomba
en courant et se cassa la jambe. Guénnolé, au milieu du trouble
que causait cet accident, invita tout le monde à la prière,
puis revenant près du blessé, il fit un signe de croix sur
la fracture, releva l'enfant en lui disant "Lève-toi, au nom du
Seigneur Jésus!" Aussitôt l'enfant se leva, ne ressentant
plus aucun mal et ne portant aucune trace de sa blessure. Budoc au retour
apprit ce qui venait de se passer et en rendit grâces au Seigneur.
Guénnolé resta dans le monastère de Budoc jusqu'à sa vingt et unième année (482). La renommée de Patrice, le grand apôtre de l'Irlande, mort vers 466, parvint à ses oreilles et durant toute une nuit, le jeune religieux se sentit brûlé du désir d'aller en Irlande vénérer les reliques de cet homme illustre. Avec l'impétuosité celtique, il voulut dès le lendemain matin mettre ce projet à exécution, et résolut de partir avec des marchands dont le navire était mouillé dans le port de Bréhat, prêt à appareiller pour l'île des Scots. Avant la fin de la nuit, Patrice lui apparut, lui donna ses instructions, lui prescrivit de rester sur le continent et de se préparer à fonder bientôt une nouvelle colonie monastique. Budoc, à qui fut racontée cette vision, y reconnut une manifestation de la volonté de Dieu. Malgré sa douleur de voir s'éloigner son cher disciple, il donna à Guénnolé onze de ses moines, avec de touchantes exhortations; il bénit cet essaim sortant de sa ruche et la séparation s'accomplit. De l'embouchure du Trieu, la petite colonie de moines se dirigea vers le Sud-Ouest, allant un peu à l'aventure, suivit la chaîne d'Arez en marchant vers l'Ouest et descendit de plus en plus vers la mer qu'elle rencontra à l'embouchure du Faou. En face de cette embouchure, nos moines aperçurent un îlot qui portait le nom singulier de Topepig (aujourd'hui Tibidy) . Comme ils ne concevaient la vie monastique que dans une île, protégée contre le contact du monde par la barrière des flots, ils se fixèrent dans cet îlot, y bâtirent un oratoire, des cellules, bêchèrent le sol pour en faire un jardin. Sur ce fonds ingrat ils passèrent trois années fort dures. A la fin, ils se décidèrent à le quitter pour regagner la côte sud-ouest, une Chersonèse en miniature, solitude coupée d'eaux, de bois, de rochers, à l'entrée de la vallée du Faou et presque an bord de la mer. C'est là que Guénnolé s'établit définitivement pour exprimer la paix profonde de ce séjour, il l'appela le monastère bien abrité Lann Tevennec (par euphonie Landevenec). Après Lavré c'est la plus ancienne abbaye de Bretagne; elle a duré jusqu'à la Révolution. A cette époque, tout le canton était inhabité, inculte, couvert de bois. Guénnolé et ses moines s'armèrent de cognées, de bûcherons ils se firent charpentiers et maçons, construisirent les murailles de leur église et de leurs cellules, pendant que d'autres cultivaient le sol nettoyé et le préparaient à recevoir la semence. Ils s'établirent là comme sur une terre vierge inhabitée et sans maître, à titre de premiers occupants. Durant les années qui suivirent la fondation, la haute vertu de Guénnolé, les nombreuses guérisons obtenues par ses prières répandirent son nom dans toute la Bretagne. Gradlon qui régnait à Corosopitum entendit parler de lui et vint lui offrir des présents; mais Guénnolé déclina ces offres et consentit seulement à le reconnaître comme suzerain, pour être protégé par lui contre les voleurs de la contrée. L'abbé d'ailleurs adoucit les moeurs sauvages de ces barbares et en gagna beaucoup au christianisme. On a placé la mort de Guéanolé
en 532 ou en 529. La nuit précédente, durant son sommeil,
une voix d'en haut avait averti le saint abbé de sa mort prochaine.
Le matin venu, il réunit tous ses moines et leur fit ses adieux.
Ceux-ci à travers leurs larmes, se plaignirent de l'abandon où
il les laissait; il leur indiqua, à titre de conseil, l'un d'entre
eux pour les gouverner; il ne voulait pas cependant imposer de contrainte
à leur libre choix. Il ajouta " Préparez-vous, car aujourd'hui
même quand j'aurai chanté la messe, Dieu me rappellera à
lui. ".
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