Saint Omer 
 

22/09-19/09
 


 
 
Saint Omer naquit, vers la fin du VIe siècle, à Orval, près de Coutance (Normandie), de parents également illustres par leur piété et par leur naissance. Son père s'appelait Friulphe et sa mère Domitta. Ils eurent grand soin de former dans les lettres et la vertu ce cher fils, qui était l'unique fruit de leur mariage. Après la mort de Domitta, la grâce croissant en lui avec l'âge, il résolut de renoncer au monde et de se faire religieux; il détermina même son père à l'y suivre. Ils vendirent donc leurs biens pour en distribuer l'argent aux nécessiteux; et ainsi, pauvres des biens de la terre, mais riches des biens du Ciel, morts au monde et ne vivant qu'en Jésus-Christ, fidèles à la grâce et ennemis du démon, ils se rendirent au monastère de Luxeuil, dans la Franche-Comté, où ils furent cordialement accueillis par l'abbé saint Eustaise (612 ou 615), qui, après les avoir soumis à de rudes épreuves, pour les débarrasser de tout lien terrestre et surtout de leur mutuel attachement, les admit ensemble à la profession. Friulphe y persévéra jusqu'à la fin et mourut saintement.
Saint Omer se rendit bientôt le modèle des autres frères. Il était chaste de corps et d'esprit, le premier à l'obéissance et à la pratique de l'humilité, le plus éclairé dans la science de Jésus crucifié, le plus aimable par sa charité et par sa douceur, et le plus exact dans l'austérité des jeûnes et des veilles. Cette ferveur ne se ralentit point dans la suite des années, comme il n'arrive que trop souvent aux jeunes gens qui commencent à servir Dieu avec beaucoup d'ardeur, et se relâchent après par leur négligence; elle augmenta tellement, que sa réputation se répandit par toute la France. Le roi Dagobert, en étant informé, le fit élire évêque de Thérouanne par les suffrages libres du clergé et du peuple; saint Achair, évêque de Tournai-Noyon, y contribua beaucoup.
Saint Omer trouva dans son diocèse une occupation digne de son zèle apostolique. Les Morins (c'est ainsi qu'on appelait les peuples du diocèse de Thérouanne), étaient malheureusement retombés dans l'idolâtrie, d'où ils avaient été tirés par les prédications de saint Victoric et de saint Fuscien, illustres martyrs de Jésus-Christ, à Amiens, où ils furent mis à mort par la cruauté du préfet Rictiovare. Il travailla avec tant d'application à ramener ses ouailles à la Foi Chrétienne, qu'après les avoir éclairées des lumières de l'Evangile, il fit brûler leurs idoles et bannit entièrement de son diocèse le culte des faux dieux. Il fut assisté, dans cette sainte expédition, par saint Bertin, saint Momnolin et saint Bertrand, qui, tous 3, secondèrent merveilleusement son zèle, comme ses fidèles disciples.
On rapporte de saint Omer un événement surprenant qui arriva lorsqu'il était à Boulogne, petite ville de son diocèse; et, comme il peut servir d'un grand exemple pour montrer l'obéissance que l'on doit à ses supérieurs, nous avons cru ne devoir pas l'omettre ici. Un clerc lui demanda permission d'aller se divertir sur le bord de la mer. Le Saint, à qui Dieu avait révélé le malheur qui lui arriverait s'il y allait, lui défendit expressément de le faire. Le clerc ne laissa pas de passer outre, et, ayant trouvé un petit bateau qui servait à passer la rivière à l'endroit où elle se décharge dans la mer, il se mit dedans pour se promener le long du rivage; mais une furieuse tempête s'étant élevée tout à coup, il se vit bientôt en danger de faire naufrage. Le péril le fit rentrer en lui-même; il eut regret de sa faute, et, se voyant à la merci des vents sans savoir où il était, il implora l'assistance du saint Evêque. Après sa prière, il aborda à terre; mais il fut bien surpris de se voir à la côte d'Angleterre. La crainte de tomber entre les mains des pirates, dans un pays si éloigné, lui fit redoubler ses prières ; il conjura de nouveau le Saint de ne le point abandonner. Se confiant en sa bonté pastorale, qu'il savait bien être informé par un esprit prophétique du péril où il était, il remonte sur son bateau, et, faisant une heureuse navigation, il arrive presqu'en un moment au même lieu d'où il était parti. Il courut aussitôt au Saint, se prosterna devant lui pour lui demander pardon de sa désobéissance, lui raconta tout ce qui s'était passé, et le remercia de la grâce qu'il avait obtenue par le mérite de son intercession. Saint Omer le reprit sévèrement de sa faute, et, lui ayant fait faire réflexion sur la punition que Dieu tire de ceux qui méprisent les ordres de leurs supérieurs, il lui fit défense de dire à qui que ce fût la merveille qui était arrivée: ce que le jeune homme exécuta fidèlement, ne l'ayant révélée qu'après la mort du saint Evêque.
Mais, quoiqu'il fît son possible pour demeurer caché aux yeux des hommes, le Ciel découvrit, par le prodige suivant, combien il était agréable à Dieu. Faisant la visite de son diocèse, il se reposa sous un arbre près d'un village appelé Jernac (présentement Journi), pour se délasser un peu de la fatigue du chemin. A son réveil, il fit planter, au même endroit où il s'était assis, une croix de bois, sur laquelle, la nuit suivante, on vit paraître une admirable clarté. Depuis, les fidèles honorèrent singulièrement ce même lieu, comme ayant été consacré par la présence d'un si saint homme. Tous les malades qui le visitent par dévotion y reçoivent la guérison de leurs maux.

Entre les conversions qu'il fit, on remarque particulièrement celle d'Adroald. C'était un seigneur des plus considérables du pays par sa naissance et par ses richesses, mais il faisait une guerre cruelle aux Chrétiens, et était tellement adonné au culte des faux dieux, que l'on perdait l'espérance de le gagner à Jésus-Christ. Saint Omer entreprit cette conversion qui eut un plein succès. Dès lors, Adroald pratiqua généreusement les conseils évangéliques : car, n'ayant point d'enfants, il donna tous ses biens à l'Eglise, et particulièrement la terre de Sithiü, où le Saint fit bâtir un beau monastère en l'honneur de la sainte Vierge. "Que vous êtes louable et heureux, Adroald", s'écrie l'historien de cette vie,"de vous être ainsi dépouillé des biens de la terre pour en revêtir Jésus-Christ ! Vous avez renoncé à un héritage temporel pour vous rendre l'héritier du Ciel; vous n'aviez point de postérité, et, par votre libéralité, vous en avez acquis une si nombreuse, qu'elle subsistera jusqu'à la fin des siècles".
Après avoir gouverné avec une vigilance vraiment pastorale l'église de Thérouanne, près de 30 années, la Providence divine le priva de la vue du corps, afin qu'étant spirituellement éclairé des lumières de la Foi, il s'approchât davantage du Ciel, où il devait bientôt recevoir la récompense de tous ses travaux. Cette cécité néanmoins ne l'ayant pas empêché d'assister, avec plusieurs autres évêques, à la translation du corps de saint Vaast, qui se fit environ l'an 667, il y recouvra la vue par l'attouchement des saintes reliques. Mais notre Saint, qui avait déjà goûté combien il était avantageux d'avoir les yeux fermés à toutes les choses du monde, pour contempler avec moins de trouble les perfections de la divinité, supplia le même saint Vaast de lui renvoyer son infirmité, afin que rien ne fût capable de le distraire de la considération des choses célestes. Heureux état dans lequel, ne pouvant plus voir la lumière corporelle, on peut contempler fixement la lumière du Ciel, converser avec les Anges, considérer à son aise les beautés ravissantes du paradis, et se rassasier, pour ainsi dire, de la vue continuelle de Jésus-Christ!
En 667 selon les uns, 670 suivant d'autres, saint Omer étant en tournée, fut pris de la fièvre dans un lieu nommé Wavrans, ou Wauvrans (à quelque distance de Saint-Omer, à 3 milles de Saint-Bertin): il comprit alors que sa dernière heure approchait. Il se fit porter à l'église, où, fondant en larmes, il offrit à Dieu l'encens de ses prières, et reçut, avec les sentiments de la plus touchante piété, le Corps et le Sang du Sauveur. Après la Communion, il se mit au lit, où, parmi le chant d'une mélodie céleste, son âme quitta sa demeure pour aller se présenter devant la majesté de Dieu. Il s'exhala, en ce moment, de son corps, une si, suave odeur, qu'elle surpassait celle des plus excellents parfums.