SAINT SABBAS
(Sava)
1er archevêque de Serbie
 

27 janvier / 14 janvier


 
 
Notre Saint Père Sabbas, le Saint le plus cher au coeur du peuple serbe, naquit en 1169. Troisième fils du grand prince de Serbie, le pieux Etienne Némanja, il fut miraculeusement accordé par Dieu, en réponse à la prière de ses parents, et reçut au Saint Baptême le nom de Radko (= Rastislav, traduction slave de Crescens). Ayant grandit dans la crainte de Dieu et dans toutes les vertus évangéliques, il fut chargé, à l'âge de quinze ans, du gouvernement de la province d'Herzégovine; mais, peu attiré par la gloire et les plaisirs de ce monde, il brûlait de jour en jour davantage d'amour divin. De retour à la cour, un an plus tard, il donnait des réponses évasives aux propositions de mariage faites par ses parents; et, lorsqu'une délégation des moines serbes du Mont Athos, dirigée par un staretz («ancien») russe, vint solliciter la générosité du grand-prince, Radko écouta avec avidité les récits de l'ancien sur la vie angélique et déjà céleste que mènent les moines dans le Jardin de la Mère de Dieu. Ses dernières hésitations, dues à son amour filial, cédèrent quand le moine lui rappela la parole du Seigneur: Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, n'est pas digne de moi (Mat. 10:37). Il décida alors de prendre, lui aussi, sa croix pour suivre le Seigneur, et, usant d'une sainte ruse, il demanda à son père sa bénédiction pour aller à la chasse au cerf et s'élança aussitôt sur les traces du divin Gibier, le Christ.

Arrivé à l'Athos, Radko devint novice au Monastère russe de Saint Pantéléimon (L'ancien Rossikon), mais il fut bientôt découvert par un voevod (duc) de la cour, que son père désemparé avait envoyé à sa recherche. Là encore, le jeune prince se servit de l'astuce du serpent (Mat. 10:16). Après le long Office Monastique, il fit servir au voevod et à sa suite un repas plantureux et profita de leur sommeil pour monter au sommet de la tour du monastère et y recevoir le saint habit angélique, changeant son nom pour celui de Sabas. Quand, au petit matin, les envoyés du roi séveilèrent, ils virent avec stupeur le prince habillé en moine leur jeter du haut de la tour ses mèches de cheveux fraîchement coupées, ses vêtements princiers et une lettre de consolation pour ses parents. Quelque temps après, Sabas devint moine au grand et prestigieux Monastère de Vatopédi, sous la direction de l'ancien Macaire. Sa noble origine, et surtout son renoncement parfait à tout ce qui est du monde, son obéissance absolue, sa parfaite humilité, son zèle pour le jeûne, la veille et la prière lui attirèrent l'admiration de tous les athonites. Il visita pieds nus tous les monastères et lieux sanctifiés de l'Athos et resta émerveillé en particulier par la vie silencieuse et détachée de soucis terrestres des ermites; toutefois, comme de retour à son monastère son supérieur ne lui donnait pas sa bénédiction pour suivre une telle voie, il s'adonna avec une ferveur encore plus grande à l'obéissance et au service des frères. Il acquit là une profonde connaissance du grec, qui lui permit de traduire en slave et de transmettre à son peuple les richesses de la tradition patristique, liturgique et canonique de l'Eglise.

Grâce à l'influence de son fils, Etienne Némanja abandonna à son tour la royauté terrestre, afin de militer pour l'acquisition du Royaume des cieux. Il abdiqua en 1196 au profit de son fils Etienne et devint moine au Monastère de Studénitsa, sous le nom de Syméon. Peu de temps après, il gagna la Sainte Montagne et prit son fils comme guide spirituel. Déjà vieux, il ne pouvait accomplir tous les travaux ascétiques des moines éprouvés, aussi Sabas redoubla-t-il ses propres combats et prit sur lui toute l'ascèse que son père ne pouvait pas entreprendre. Il lui disait: «Je suis ton jeûne et tes prosternations. Je suis ton ascèse ( ... ) C'est moi qui suis responsable devant Dieu pour toi, puisque tu m'as écouté et que tu es venu jusqu'ici». Ayant répandu en abondance leurs aumônes au profit des monastères, les deux princes-moines fondèrent, avec la protection de l'empereur Alexis III Ange (+ 1203), le Monastère de Chilandar, qui allait devenir le centre de la piété et de la culture ecclésiastique serbes. Ils s'y installèrent avec des moines serbes, auxquels se joignirent bientôt des moines d'autres nationalités, et y progressèrent continuellement dans de célestes ascensions. En 1200, Saint Syméon mourut (il est célébré par l'Eglise le 13 février) et bientôt son corps commença à exhaler un baume miraculeux qui accomplissait quantité de miracles. Après avoir laissé un Higoumène à Chilandar, Sabas put alors réaliser le désir de son coeur: vivre seul avec Dieu. Il s'installa dans une cellule près de Karyès, la petite capitale de la république monastique, et, tout entier captif de l'amour du Christ, ne regardant que vers le ciel et vers les biens du monde à venir, il suppliait jour et nuit le Seigneur de le prendre en pitié, lui le plus grand des pécheurs. Ayant été instruit par une révélation de la gloire céleste acquise par son père, il rédigea sa biographie et composa son Office Liturgique. Pendant ce temps, en Serbie, ses deux frères, les princes Etienne et Vukan, s'affrontaient dans une guerre sanglante. Ils firent appel à Sabas qui, après avoir été ordonné Prêtre et élevé à la dignité d'Archimandrite à Thessalonique, s'embarqua pour sa patrie avec les Reliques miraculeuses de Saint Syméon. Grâce à l'intervention du saint moine, les deux princes se réconcilièrent devant le tombeau de leur père, et le peuple serbe put jouir alors de la paix et des nombreux miracles accomplis par le baume qui continuait à couler de la châsse du Saint. Pressé par Etienne et par le peuple Saint Sabas resta alors en Serbie, devint Higoumène de Studenitsa et, sans rien négliger de son mode de vie ascétique, il accomplit de nombreuses oeuvres apostoliques, confirma le peuple dans la Sainte Foi Orthodoxe, combattit les hérésies, fit construire églises et monastères qu'il organisa selon les règles athonites, et orna sa patrie des moeurs et des lois évangéliques. Il fonda le grand Monastère de Zicha, qui devait devenir un peu plus tard le siège de l'Archevêché serbe et le centre de la vie ecclésiale du pays.

A la suie de la sanglante prise de la capitale byzantine par les Croisés (1204) et de la fuite à Nicée de l'empereur et du patriarche, l'empereur latin de Constantinople entreprit d'envahir aussi la Serbie, avec l'aide du roi de Hongrie, André. Réduit à la dernière extrémité, Etienne répudia son épouse Eudoxie, fille de l'empereur byzantin Alexis et fervent soutien de l'Orthodoxie, pour épouser une noble d'origine vénitienne, et il se montra prêt à se faire couronner par le pape, reconnaissant ainsi l'autorité de Rome sur son pays et sur l'Eglise serbe. Désapprouvant de telles concessions, mais sans juger son frère, Sabas préféra se retirer et regagna la Sainte Montagne (1216), où il consacra son temps à prier Dieu pour le salut de son peuple. Peu après, le baume de Saint Syméon ayant cessé de couler, les Serbes firent appel à l'intercession du Saint moine. Sabas envoya, par l'intermédiaire de son disciple Hilaire, une lettre pour Etienne et une autre adressée à son père. Dès qu'Hilaire lut cette missive devant le tombeau du Saint, le baume se remit à jaillir à profusion, non seulement du tombeau mais aussi des Icônes de Saint Syméon, remplissant le peuple de joie spirituelle et confirmant ainsi que la faveur divine était du côté de Sabas et de l'Orthodoxie.

En 1219, Saint Sabas se rendit à Nicée et rencontra l'empereur Théodore ler Lascaris, qui lui accorda la pleine autonomie pour l'Eglise serbe, à la condition qu'il acceptât d'en devenir lui-même le premier Archevêque. Le jour de sa consécration par le Patriarche, on put voir une lumière divine entourer le nouveau Hiérarque. De retour en Serbie, Saint Sabas se mit immédiatement au travail pour organiser l'Eglise serbe. Il ordonna ses meilleurs disciples comme Evêques, couronna solennellement son frère, qui fut dès lors connu sous le nom de Premier couronné (Prvovenchani), traversa le pays en prêchant la Vraie Foi, la pénitence et la pureté des moeurs, ordonna des Prêtres, fonda partout des églises et des monastères, traduisit et imposa l'observation des Saints Canons Ecclésiastiques.

De tels succès attirèrent la jalousie du roi de Hongrie, qui prépara une nouvelle invasion. Saint Sabas, envoyé comme médiateur, apaisa le roi André par la force de sa parole. A son retour le prince Etienne décéda sans avoir pu réaliser son voeu: devenir moine. Saint Sabas adressa alors une ardente prière au Seigneur, et le défunt retrouva la vie le temps de revêtir le saint habit monastique, sous le nom de Simon, et de communier aux Saints Mystères, puis il remit en paix son âme à Dieu dans l'attente de la Résurrection.

Après le couronnement du fils d'Etienne, Radoslav (1230), l'Archevêque partit en pèlerinage en Terre Sainte. Il vénéra avec larmes les lieux sanctifiés par la présence du Seigneur, séjourna au Monastère de Saint Sabas, où il reçut le bâton pastoral de son Saint Patron, conformément à une prophétie de -Saint Sabas le Sanctifié annonçant que longtemps après sa mort devait venir de loin un homme de Dieu portant son nom et pasteur d'un peuple nombreux. Après avoir rencontré le saint empereur Jean III Batatzès (mémoire le 4 novembre) à Nicée et être passé sur la Sainte Montagne pour saluer ses frères, il regagna la Serbie, où l'attendaient de nouveau les problèmes de la cité terrestre. Radoslav, détrôné par une révolte de la noblesse, lui demanda à devenir moine. Son jeune frère, Vladislav, reçut la couronne à sa place et épousa la fille du roi Jean II Asen de Bulgarie, la puissance alors dominante dans la péninsule des Balkans (1233).

Ayant ainsi rétabli l'ordre dans le royaume et approchant de la vieillesse, Sabas renonça au trône archiépiscopal, remit la direction de l'Eglise serbe à son disciple Saint Arsène ler (1234-1264, commémoré le 28 octobre) et entreprit un nouveau pèlerinage en Terre Sainte, en Egypte, au Mont Sinaï et à Antioche. Tombé malade en approchant de Constantinople, il séjourna quelque temps au Monastère de l'Evergétis, puis il se rendit à Tirnovo, en Bulgarie, où il fut solennellement accueilli par le roi Asen. Epuisé par ses nombreux voyages et par de si longues années consacrées au service de l'Eglise, il décéda le 14 janvier 1235 (1236). Avant de rendre son âme à Dieu Saint Sabas remit le peuple serbe à la bienveillance de Dieu et termina sa prière en disant, comme Saint Jean Chrysostome: «Gloire à Dieu pour tout! » Son visage était alors tout étincelant de lumière. Le corps du Saint fut déposé dans l'église des Quarante-Martyrs à Tirnovo et, deux ans plus tard, le roi Vladislav vint en personne le demander au souverain bulgare et le ramena en Serbie, au Monastère de Milésevo qui devint un grand centre de pèlerinage. Pendant l'occupation turque, le cruel Sinan pacha, ayant été chargé par le sultan de mettre fin aux révoltes des Serbes, s'empara des Saintes Reliques et les fit brûler à Belgrade, le 27 avril 1594. Privé de la présence terrestre de son saint protecteur, le peuple orthodoxe resta cependant invaincu, car Saint Sabas ne cesse d'intercéder dans le ciel pour la sauvegarde de l'Eglise.