SAINT THÉODOSE le
CÉNOBIARQUE 24 janvier / 11 janvier |
Saint Théodose,
chef et pilote de ceux qui menaient la vie communautaire en Palestine (cénobiarque
= «chef des cénobites») et astre brillant pour l'éternité
dans le firmament spirituel, naquit vers 423 dans le village de Garissos,
en Cappadoce, de parents pieux et craignant Dieu, qui lui inspirèrent
l'amour des saintes vertus et de l'application aux Saintes Ecritures. Devenu
lecteur dès son jeune âge, il aimait à méditer
sur l'histoire d'Abraham, le modèle de tous ceux qui s'exilent par
amour du Seigneur (Gen. 12), et sur les paroles de l'Evangile qui recommandent
de quitter parents, biens et amis pour hériter la vie éternelle
(Mat. 19:29). L'âme brûlante d'une divine ardeur il décida
un jour d'appliquer ces préceptes et prit la route de Jérusalem.
Passant dans la région d'Antioche, il alla prendre la bénédiction
de l'illustre Saint Syméon le Stylite (mémoire le 1er septembre).
Le vieillard le salua de loin, en disant: «Théodose, homme
de Dieu, sois le bienvenu! » Il le fit monter en haut de sa colonne,
l'embrassa tendrement et lui prédit qu'il deviendrait le pasteur
d'un immense troupeau de brebis spirituelles.
Parvenu à Jérusalem, après avoir vénéré les Lieux Saints, Théodose se demanda comment il pouvait commencer dans la vie ascétique. Certes, il désirait mener la vie solitaire; mais, averti des dangers d'entrer dans la lutte contre les ennemis invisibles sans avoir été préalablement exercé au combat par un maître expérimenté, il se mit à la recherche d'un tel guide et le trouva en la personne d'un vieillard originaire de Cappadoce, nommé Longin, qui brillait de toutes sortes de vertus parmi les moines consacrés au service de la basilique de la Résurrection (les spoudaioi). Une fois instruit, par l'obéissance, à ne faire, comme le Christ, que la volonté de Dieu le Père et à discerner avec science le bien et le mal, il s'installa seul dans une église située sur le chemin de Bethléem. Lorsque la riche et pieuse fondatrice de cette église voulut le mettre à la tête d'une communauté de moines, il se retira dans une grotte située sur une montagne déserte, où, disait-on, les Mages avaient logé après avoir vénéré l'Enfant-Dieu. Tendu avec ardeur vers le ciel et oubliant tout ce qui est de la terre, Théodose y purifiait son âme par la mortification sans relâche des plaisirs de la chair, par la station debout durant toute la nuit, soutenu par des cordes qu'il avait suspendues au plafond, par la psalmodie et la prière incessantes. Il demeura trente ans sans manger un morceau de pain, en ne se nourrissant que de dattes, de fèves et de quelques herbes qui poussaient dans la grotte. La renommée de ses combats et de la vie divine qui brillait en lui attirèrent bientôt vers la grotte de nombreux disciples. Il n'en reçut d'abord que six, puis douze, et enfin accepta tous ceux que Dieu lui envoyait. En premier lieu, il leur enseignait à tenir toujours devant leurs yeux la pensée de la mort, comme fondement de la vie en Christ. Un jour, il leur fit creuser un vaste sépulcre et leur dit: «Voici votre tombeau, qui de vous veut l'inaugurer?» Un prêtre, nommé Basile, tomba à genoux et demanda au Saint sa bénédiction pour partir le premier vers le Seigneur. Théodose ordonna alors de célébrer les offices de commémoration du 3e, du 9e et du 40e jour, comme il est coutume jusqu'à nos jours pour les défunts. Sitôt venu le 40e jour, Basile expira, et pendant les 40 jours suivants Théodose le vit se tenir spirituellement au milieu des frères pendant la psalmodie. Une veille de Pâques, les frères, manquant de toute nourriture et même de pain pour célébrer la Sainte Liturgie, s'agitaient inquiets. Théodose, recueilli en lui-même dans un endroit isolé, leur recommanda de ne mettre leur espérance qu'en Dieu. De fait, la nuit venue, deux mulets arrivèrent à la porte du Monastère chargés de provisions qui durèrent jusqu'à la Pentecôte. La grotte devint vite trop étroite pour le nombre grandissant de disciples, et de riches amis, prêts à contribuer à toutes les dépenses, pressaient le Saint de choisir un emplacement convenable pour édifier un grand monastère, conformément à la prophétie de Saint Syméon. Dabord hésitant, de peur de perdre les fruits de la vie solitaire, Théodose parvint à la conclusion, qu'avec l'aide de Dieu, il pourrait garder son âme dans une paix imperturbable, tout en menant un grand nombre d'hommes sur la voie du Salut. Il prit donc un encensoir, l'emplit de charbon, et s'avança droit devant lui, en priant Dieu d'allumer» Lui-même l'encens lorsqu'il parviendrait à l'endroit convenable. Le Seigneur accorda ce signe à son serviteur dans un lieu situé à environ 7 km de Bethléem. On y construisit bientôt de vastes bâtiments pour les moines, avec des ateliers et tout ce qui est nécessaire pour les libérer des distractions causées par les relations avec le monde extérieur. A cette cité évangélique étaient jointes plusieurs annexes: une hôtellerie pour les moines étrangers, une autre pour recevoir les pauvres et les indigents, un hôpital pour les malades, un hospice pour les moines âgés et un asile pour les aliénés. Oeil pour les aveugles, pied pour les boiteux, toit pour les sans-toit, vêtement pour ceux qui étaient nus, le Saint se faisait tout pour tous, il soignait lui-même les plaies les plus répugnantes et embrassait tendrement les lépreux. Les indigents accourraient en si grand nombre au monastère, en ces temps de disette, qu'on allait jusqu'à dresser la table cent fois par jour. Pour subvenir à de tels besoins, Dieu intervenait fréquemment par des miracles et multipliait le pain et les vivres. La communauté était composée de plus de 400 moines de nationalités différentes. C'est pourquoi le Saint avait fait construire quatre églises dans l'enceinte du monastère: une où l'on célébrait la louange de Dieu en grec, l'autre en syriaque, une autre en arménien, et la quatrième était réservée aux aliénés et aux possédés. Sept fois le jour les hymnes s'élevaient vers le ciel en un accord harmonieux de diverses langues, et tous se réunissaient dans l'église des Grecs, après la lecture de l'Evangile, pour célébrer en commun la Sainte Eucharistie. Père unique, Théodose prenait soin de chacun et montrait à tous, par sa conduite et ses enseignements, une vivante image du Christ. A la mort de Gérontios, le supérieur du monastère fondé par Sainte Mélanie (31 décembre), il fut élu comme supérieur (archimandrite) et chef de tous les moines vivant en communautés, alors que Saint Sabas (5 décembre) était placé à la tête des ermites et de ceux qui vivaient dans les laures. Les deux Saints étaient unis par une grande charité, ils se rencontraient souvent pour s'entretenir de sujets spirituels et luttèrent de concert contre les hérétiques. En ce temps-là (513), l'Eglise était en effet troublée par l'empereur Anastase, qui avait pris la défense des monophysites, ennemis du Concile de Chalcédoine. Il déposa le Patriarche de Jérusalem Elie, lui substitua un hérétique, et tenta d'attirer à lui tous les moines éminents de Palestine, en particulier Saint Sabas et Saint Théodose. Si, par humilité, saint Théodose se laissait vaincre et contrarier en toute chose, il se montrait toutefois intraitable en ce qui concernait Dieu et les Saints Dogmes de l'Eglise. Il rassembla tous les habitants des déserts, leur déclara que le temps était venu pour le «doux de se changer en guerrier» (Joël 3:11), et écrivit au souverain une lettre, où il annonçait la ferme décision des moines de rester fidèles jusqu'au sang à la doctrine des Saints Conciles OEcuméniques. Impressionné par ce courage, Anastase relâcha pour un peu de temps ses persécutions, mais les reprit bientôt de plus belle. Théodose se rendit alors à la basilique de la Résurrection et, du haut de l'ambon, s'écria: «Si quelqu'un refuse d'accepter les quatre Saints Conciles au même titre que les quatre Saints Evangiles, qu'il soit anathème!» Puis, à la tête d'une armée de moines, il parcourut la ville en confirmant le peuple dans la foi par sa parole et ses miracles. Envoyé en exil sur ordre de l'empereur, il put regagner son monastère, deux ans plus tard, lors de l'avènement de Justin 1er, favorable à l'Orthodoxie (518). Un fois la paix rétablie, le bienheureux continua de répandre la bénédiction de Dieu sur les hommes: il guérit des maladies incurables, d'un seul grain de blé il remplit un grenier entier, il rendit fécondes des femmes stériles, chassa des nuées de sauterelles, fit venir la pluie, délivra des voyageurs en danger, annonça sept ans à l'avance le séisme qui détruisit la ville d'Antioche (526). Mais ne comptant pour rien tant de grâces, il montait sans cesse vers Dieu, en s'enfonçant dans l'abîme de l'humilité. Voyant un jour deux de ses disciples qui se disputaient, il se jeta à leurs pieds et refusa de se relever tant qu'ils ne se furent pas réconciliés. Une autre fois, comme il avait interdit la communion à un moine responsable d'une faute grave, celui-ci répliqua en faisant la même défense au Père. Théodose obéit, et ne se présenta à la communion que lorsque le moine se fût rétracté. Affligé, vers la fin de ses jours, d'une longue et douloureuse maladie, il supportait tout, comme Job, avec action de grâces, refusait de prier Dieu d'en être délivré et ne relâchait en rien sa règle d'ascèse et de prière. Un peu avant son trépas, il exhorta ses moines à la persévérance dans les épreuves, leur promit de toujours intercéder au ciel pour son monastère; puis, après avoir rassemblé tous les Higoumènes de Palestine, il les bénit et remit son âme à Dieu. Il était âgé de 105 ans (529). Ses funérailles furent célébrées avec tous les honneurs possibles par le Patriarche, en présence d'une foule immense de moines et de laïcs. On ensevelit son corps dans la première grotte où il avait demeuré, et peu de temps après les miracles commencèrent à abonder. De toutes les vertus de Saint Théodose,
trois restèrent à ses disciples comme un vivant héritage:
une sévère ascèse jusqu'à la mort, accompagnée
d'une foi inébranlable; la miséricorde envers les pauvres
et les malades, et l'assiduité continuelle à la prière
et à la louange de Dieu.
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