Saint WULMER
02/08 - 20/07
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Au commencement du VIIe
siècle de l'ère Chrétienne, sur le territoire du Boulonnais,
et dans un lieu nommé "Sylviacum", aujourd'hui "Samer" (Pas-de-Calais),
naquit de parents Chrétiens et nobles, un homme que ses vertus
éclatantes et sa sainteté admirable devaient placer au rang
des Saints. Walhert et Dude, ses parents, avaient encore un autre fils,
auquel ils avaient donné le nom de Wamer. La jeunesse du Saint se
passa dans la résidence féodale de ses pères, au milieu
des occupations toutes barbares encore des anciens Francs. Mais Dieu, dont
les secrets sont impénétrables, se sert de toutes sortes
de moyens pour parvenir à ses fins: comme il avait dessein de couronner
un jour Wilmar d'une gloire immortelle, il l'humilia d'abord pour l'élever
ensuite à ce haut degré d'honneur.
Le jeune franc rechercha en mariage une noble fille nommée Osterhilda, ignorant qu'elle avait été promise à Wilmer, un de ses compatriotes. Il était au moment de voir ses voeux accomplis, quand, en vertu du droit des fiançailles, son rival recourut au roi des Francs. Celui-ci le soutint dans ses prétentions, et, sur son ordre, Wilmar dut renoncer à celle que son coeur avait choisi. Froissé dans ses plus tendres affections, le jeune homme prit en dégoût le monde, qui s'ouvrait à lui avec de telles déceptions et, brisant tout ce qui pouvait encore l'attacher à la vie du siècle, il résolut de se consacrer à Dieu dans la nuit et l'obscurité du cloître. Ainsi donc, la Providence l'humilia aux yeux du monde, pour l'exalter à la vue des Anges, s'emparer entièrement de son coeur et l'attirer plus fortement au service de Jésus-Christ. Wilmar partit sur-le-champ et se rendit en
Hainaut, vers le monastère de Hautmont, où l'abbé
le reçut avec la plus grande bienveillance (642).
Voilà quels durent être les sentiments de Wilmar nouvellement converti; mais ce n'était que le commencement d'un changement si heureux. Pour éprouver le jeune novice, et voir si sa vocation venait d'en haut, l'abbé s'appliqua d'abord à lui faire pratiquer les vertus les plus difficiles : l'humilité de Jésus-Christ, le mépris de soi-même, et le renoncement à sa propre volonté. Il avait bien compris qu'à l'ombre du cloître il n'était plus question de rang ou de condition, que là il n'y avait plus de pauvre ni de riche, de serf ni de suzerain parce qu'entre l'âme de l'esclave et celle de l'homme libre, il n'y a point de différence devant Dieu. Aussi, soumis et obéissant à ceux qui devaient le guider dans la voie du salut, pratiquait-il avec bonheur les conseils les plus sublimes de la perfection évangélique. Son supérieur lui donna la conduite des boeufs et lui confia le soin d'aller chercher tout le bois nécessaire pour les besoins du monastère. Wilmar s'acquitta de ces pénibles fonctions avec tant de joie et de ferveur, que toute la communauté en fut extrêmement édifiée. Son zèle alla plus loin encore : se levant la nuit et entrant doucement dans la grande chambre du dortoir, il enlevait les chaussures des frères, pour les nettoyer. L'abbé, à qui ceux-ci donnèrent connaissance du fait, fut fort édifié de tant de simplicité de coeur et de charité. Voulant en connaître l'auteur, il veilla lui-même secrètement, et parvint à le découvrir. Wilmar, en effet, s'étant approché de la cellule de son supérieur, pour lui rendre furtivement le même service, fut aussitôt saisi par la main, et reçut l'ordre de déclarer à l'instant qui il était. Interdit et confus à celte demande, mais pressé par l'obéissance qu'il devait à son supérieur, le serviteur de Dieu répondit à regret qu'il était ce jeune homme venu des bords de la mer, et à qui il avait donné depuis quelque temps le saint habit de la religion. L'abbé, heureux de voir tant de modestie dans un si jeune religieux, lui dit: « Allez, mon fils, faites ce que vous souhaitez". C'était l'autoriser à continuer son humble et pieux exercice. Toutefois, pour ne pas offenser sa modestie, il ne révéla cette action qu'après le départ de Wilmar. Telles étaient donc chaque jour les occupations par lesquelles l'athlète du Christ s'exerçait à la pratique des vertus chrétiennes, dans l'abbaye de Hautmont. Mais le Ciel, qui avait sur lui des vues plus grandes, et qui voulait le réserver pour la conduite des âmes et la fondation d'un nouveau monastère, ne permit pas qu'il restât plus longtemps chargé de ces humbles fonctions. L'Esprit-Saint, qui s'était fait de cet homme un temple choisi, lui inspira la pensée de se livrer à l'étude des lettres, afin de le mettre à même de rendre de plus grands services à l'Eglise de Dieu. Wulmer, docile à l'inspiration de la grâce, se fit initier par les frères à cette étude, dont il ignorait même les premiers principes. Sans se relâcher en rien de son exactitude à accomplir les autres travaux qui lui étaient imposés, il donnait à ce nouveau genre d'occupation tout le soin dont il était capable. Un jour cependant, selon son habitude, conduisant son chariot dans la forêt voisine, il marchait devant ses boeufs, tenant en main ses tablettes et étudiant avec ardeur. La méditation profonde dans laquelle il était plongé l'absorbait tellement, que son chariot s'arrêta sans qu'il s'en aperçût. Après avoir ainsi cheminé seul quelque temps, il tourna instinctivement la tête, et vit ce qui lui était arrivé. Alors, comprenant l'avertissement qui lui venait d'en haut, il retourne sur ses pas, ramène son attelage, et s'occupe uniquement du labeur qui lui était confié. L'abbé, ayant appris le fait, et reconnaissant l'impossibilité d'allier ensemble le travail des mains et celui de l'esprit, donna à un autre le soin d'aller chercher le bois, et ordonna à Wilmar de s'appliquer exclusivement à l'étude des lettres. Les progrès rapides qu'il fit en peu
de temps, ainsi que les bons exemples qu'il donnait à la communauté,
par son humilité et sa douceur, engagèrent l'abbé
à l'élever à la dignité sacerdotale.
Le Seigneur, dans ses desseins merveilleux pour l'accroissement de son Eglise et la civilisation des peuples, inspirait aux hommes de ce temps le désir de fonder partout de nombreux monastères. Les immenses forêts qui couvraient alors la surface de la France furent ainsi peu à peu défrichées : l'abbaye devint partout un centre de population, quand elle ne donna pas naissance à une cité, à une capitale. Saint Wilmar, guidé par l'Esprit de Dieu, se dirigea alors vers les contrées boisées de la Flandre, n'emportant avec lui que les objets nécessaires au saint sacrifice, et une hache pour se frayer une route dans l'épaisseur des bois. Dès qu'il fut arrivé dans ces forêts, il se cacha dans le creux d'un chêne, où il jeûna 3 jours et 3 nuits, aspirant en longs désirs l'éternelle félicité, et dévoilant à Dieu les dernières craintes de son âme. Mais le Seigneur, qui n'abandonne jamais les
siens dans le besoin, prit soin de ce noble reclus, de cet illustre pénitent.
Apparaissant en songe à un homme de qualité qui vivait près
de là, il lui dit: "Vous vous préparez des mets délicieux
et des vins exquis, pendant que mon serviteur Wilmar meurt de faim, dans
le creux d'un arbre où il s'est caché".
Après que Wilmar eut pris sa réfection, le gentilhomme, cédant aux inspirations de l'Esprit-Saint, lui dit: «Puisque vous faites profession d'être le serviteur de Dieu, travaillez donc aux intérêts de sa gloire. Venez sur mes terres instruire mes nombreux vassaux; je vous donnerai une partie de mon héritage, où vous pourrez bâtir une cellule et conquérir des âmes à Jésus-Christ". Le saint fit d'abord de grandes difficultés, pour quitter sa chère solitude. Cependant il céda aux instances du pieux gentilhomme, et lui dit: « Retournez en votre demeure, et demain venez me prendre, je ferai tout ce que vous désirez". Le jour suivant, selon sa promesse, Wilmar suivit son généreux bienfaiteur, et reçut de cet homme fidèle un emplacement convenable pour la construction d'une église. Ses bons exemples, ses prédications continuelles, firent la plus grande impression sur les habitants de ce pays. Le succès en fut tel, que le chevalier lui confia son propre fils, pour l'instruire et l'élever dans les choses qui regardent le service de Dieu. Bien plus, voyant qu'il opérait les plus grands prodiges de conversion, dans toute l'étendue de son domaine, il lui donna tous les biens qu'il possédait, exemple qui fut bientôt suivi par 2 de ses frères et quelques autres seigneurs du même pays. Mais là n'était pas le terme que le Seigneur avait fixé à la carrière de Son serviteur. Il est des peuples auxquels le divin Pasteur des âmes dispense Ses grâces avec plus de largesses, ses bienfaits avec plus d'abondance. La plus grande partie des bénédictions que le Ciel semait sur les pas d'un si grand saint devait revenir de droit à la Morinie, qui lui avait donné naissance. Aussi l'Esprit de Dieu, qui dispose toutes choses pour la plus grande gloire de l'Eglise [no comment! JMD], inspira-t-il à Wilmar la résolution de se soustraire encore au commerce des hommes et de s'enfoncer de nouveau dans les bois les plus solitaires. S'apercevant qu'on le respectait et qu'on le considérait beaucoup, à cause des nombreux miracles que Dieu opérait par son ministère, il songea de nouveau à la retraite. « Wilmar, Wilmar", se disait-il, "toi qui te fais gloire d'être disciple de Jésus-Christ, ne t'attache point à ce monde, ni la vaine estime des hommes. Le Maître te dit qu'il a vécu inconnu au monde, car il est écrit : Il était dans le monde, et le monde a été fait par lui, et le monde ne l'a point connu». Aussi, fuyant les louanges et les honneurs
dont il était entouré, il vint se cacher dans cette vaste
étendue de forêts, qui couvrait toute la contrée actuellement
comprise entre Desvres et Tingry, et qui, alors, faisait partie des possessions
territoriales de ses pères.
Pendant que, retiré dans une cabane qu'il s'était bâtie, il se livrait à ces pieux exercices de pénitence, il arriva qu'un jour son frère, allant à la chasse, le rencontra sans le reconnaître; mais, étonné de voir un si vénérable solitaire, établi dans son domaine, sans qu'il l'eût appris, il lui demanda qui il était, d'où il venait, qui lui avait permis d'habiter les terres de sa seigneurie. A ces questions le Saint répondit, non sans quelque émotion, qu'il était un pauvre pécheur qui se cachait pour faire pénitence, et qu'il le priait, au Nom de Dieu, dont il était le ministre, de vouloir bien le garder dans son domaine. « Seigneur", lui dit-il, "priant Dieu pour les hommes, je me nourris des herbes qui croissent dans vos bois, j'étanche ma soif aux ruisseaux qui y coulent, et n'ai point d'autre lit que la terre: ayez donc la bonté de me laisser où le Ciel m'a conduit". Wamer, que cette réponse ne satisfaisait pas, le pressa plus vivement de lui dire qui il était. « Puisque vous attachez tant d'importance", lui dit le solitaire, «à savoir qui je suis, il faut céder à vos instances et à la violence que vous me faites; sachez donc que je suis né en ces lieux, que je m'appelle Wilmar". Wamer interdit se jeta dans ses bras, et l'engagea à retourner avec lui dans la demeure de ses ancêtres. Mais le solitaire fut inflexible, et, malgré tout le bonheur qu'il aurait eu à revoir une mère inconsolable depuis son départ, il refusa d'accéder à sa demande. Wamer, de retour, apprit à la noble
châtelaine l'arrivée de Wilmar dans ses bois et l'entretien
qu'il avait eu avec lui. Aussitôt celle-ci, transportée d'une
joie indicible, lui ordonna de porter à son frère toutes
les choses dont il pouvait avoir besoin. Wamer partit sur-le-champ, mais
ne trouva plus le solitaire dans l'endroit où il l'avait laissé.
Alors il se mit à parcourir la forêt, en faisant tout retentir
du nom de Wilmar, qui vint avec bonté à la rencontre de son
frère.
Sur ces entrefaites, Ceadwalla, roi de Wessex,
en Angleterre, traversait la Morinie, pour se rendre auprès du pape
de Rome et recevoir de sa main le sacrement de baptême. Ayant appris
le rare mérite et la sainteté de Wilmar, il voulut le voir,
et recueillir de sa bouche quelques instructions propres à le guider
dans la voie du Salut et à le fortifier dans une aussi pénible
et aussi glorieuse entreprise.
Au milieu de toutes ces nouvelles institutions,
Wilmar voulait encore donner à Dieu des servantes fidèles
et affectionnées à son service, et une retraite aux saintes
filles qui, abandonnant la vie du siècle, voulaient se consacrer
entièrement au service du Seigneur. C'est pourquoi il éleva,
dans un village appelé Wileria (Wierre-aux-Bois), un monastère
de femmes, dont il confia le soin à sa nièce Bertane ou Heremberthe.
En choisissant la fille de son frère, Wilmar ne se laissa point
déterminer par des considérations de parenté : il
ne fit que rendre justice à la piété et à la
vertu. La soeur montra qu'il ne s'était pas trompé, car Heremberthe
se conduisit avec tant de sagesse, qu'elle devint le parfait modèle
de ses soeurs, et mérita, après sa mort, d'être glorifiée
éternellement dans le Ciel.
La paternelle bonté du bienheureux Wutmer ne s'étendait pas seulement sur ses enfants; tous ceux qui l'approchaient, même ses ennemis, en ressentirent plus d'une fois l'influence. Un voleur, ayant dérobé un cheval aux frères, erra toute la nuit sans pouvoir retrouver sa demeure; et, après avoir parcouru toute la campagne voisine, il se retrouva le matin devant la porte de l'abbaye. Deux religieux, qui sortaient alors pour se rendre à leurs travaux habituels, le saisirent aussitôt et prièrent le saint de le retenir en prison. Mais celui-ci n'en voulut rien faire, et se contenta de prècher au malfaiteur la parole de Dieu. Puis il le renvoya, sans chercher à le punir d'aucune autre manière. Ainsi se passaient, dans la pratique de toutes
les vertus, les jours du bienheureux serviteur de Jésus-Christ.
Ses exhortations devenaient de jour en jour plus vives et plus pressantes.
«Qu'elle est petite la porte», disait-il souvent àses
religieux, «qu'elle est étroite la voie qui conduit à
la vie, et combien peu la trouvent ! Vous, sur le chemin du Ciel et éloignés
de la vie du monde, vous avez des actions de grâces immenses à
rendre à la Providence". C'était surtout par ses exemples
que le saint abbé les guidait dans le chemin de la vertu. Simple
dans son intérieur, ardent à la prière et à
tous les exercices de la communauté, toujours occupé de bonnes
oeuvres, il mettait en pratique ces paroles du Psalmiste: « Je bénirai
en tout temps le Seigneur, sa louange sera toujours dans ma bouche".
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