SAINT CHRISTOPHE
Grand Martyr  

22 mai - 09 mai


 
 
Christophe, Callinique, Aquiline et  deux cents soldats qui crurent par lui au Christ .

La quatrième année du règne de Dèce (vers 251), des soldats arrivèrent dans une ville d'Orient et soumirent à la torture tous les Chrétiens qu'ils y trouvèrent. Un jeune mercenaire, issu d'une tribu barbare, nommé Réprobe, qui avait la stature d'un géant mais était fort laid de visage1, fut pris de compassion devant ce spectacle. Incapable cependant de communiquer avec les Chrétiens dans leur langue, il tomba à genoux et, mû par l'élan inné de la nature, il adressa une prière à Dieu. Un Ange lui apparut alors et, lui touchant les lèvres, il lui procura la connaissance de la langue des Romains. Rempli d'audace par cette apparition céleste, Réprobe rentra en ville et couvrit les persécuteurs de reproches, en confessant sa foi au Christ. Un certain Bacchus se précipita sur lui pour le frapper au visage. Le géant se laissa faire et lui dit avec douceur : « C'est par obéissance au commandement du Christ que je supporte tes coups, car si je laissais libre cours à ma colère, tout votre empire corrompu ne pourrait me résister. »

L'empereur, ayant été averti, envoya une escouade de deux cents soldats pour arrêter le séditieux. Après bien des recherches, ils le trouvèrent au moment où, priant devant une église et ayant planté son bâton en terre, celui-ci avait aussitôt germé. Le Saint leur demanda de lui accorder encore un peu de temps, pour recevoir le Saint Baptême ; et, afin de leur prouver la faveur qu'il avait acquise auprès de Dieu, il multiplia les provisions des soldats, qui aussitôt crurent tous au Christ. Ils se rendirent alors ensemble à Antioche, où ils furent baptisés par Saint Babylas , Réprobe recevant le nom de Christophe (c'est-à-dire "Porteur du Christ").

Lorsque le Saint comparut devant l'empereur, celui-ci, effrayé par son aspect terrible et repoussant, tomba à la renverse. Puis, ayant retrouvé la maîtrise de lui-même, il tenta de le faire renoncer à sa foi. Comme il n'osait provoquer ce géant par des menaces, il fit envoyer auprès de lui deux prostituées, Callinique et Aquiline, avec ordre d'user de tous leurs charmes pour entraîner Christophe à la fornication et, de là, au culte des idoles. Mais il advint juste le contraire. Christophe convertit les deux femmes, en leur montrant que rien de terrestre ne peut être comparé à la vie étemelle. Elles confessèrent leurs péchés, et le Saint intercéda pour elles auprès de Dieu. Le lendemain, elles se présentèrent devant l'empereur en confessant leur foi. Furieux, Dèce les fit suspendre par les cheveux, avec une lourde pierre attachée aux pieds. Aquiline succomba sous la souffrance, le 1er avril. Le lendemain, Callinique fit mine de se soumettre et demanda à être conduite au temple des idoles. Après s'être fait montrer la statue de Zeus, elle y attacha sa ceinture et, usant de toute sa force, elle la renversa, puis elle fit de même pour les statues d'Hercule et d'Apollon. Saisie aussitôt par les païens, elle fut embrochée, des pieds aux épaules, et rendit l'âme en se confiant aux prières de Saint Christophe.

Cinq jours plus tard, retournant sa colère contre les soldats convertis par Christophe, le tyran les fit décapiter et ordonna de brûler leurs corps en dehors de la ville. Ils restèrent cependant intacts et les Chrétiens vinrent les ensevelir dignement.

Dèce fit ensuite enfermer le Saint dans un récipient d'airain percé de quatre trous et le déposa sur un brasier. Mais Christophe n'en ressentit aucune brûlure et, à ce spectacle, plus de mille païens présents s'écrièrent : « Grand est le Dieu des Chrétiens! » Puis ils tombèrent aux pieds du Martyr, en disant : « C'est à juste titre qu'on t'appelle "Christophe", car en vérité tu portes le Christ en ton coeur, et tu comptes ainsi pour rien les tourments des tyrans. » De la fournaise, le Saint leur enseigna les principes de la foi chrétienne et leur révéla qu'il contemplait en vision un personnage grand et majestueux, resplendissant plus que le soleil, portant une couronne sur la tête et entouré de myriades de soldats à l'aspect igné, qui écrasaient les cohortes des noirs démons lancés contre eux. Apprenant ainsi la victoire du Christ et de ses disciples sur toutes les entreprises du Malin, les nouveaux convertis délivrèrent le Saint. Mais, dès le lendemain, craignant une émeute, l'empereur profita d'une fête païenne pour faire exécuter tous ceux qui s'étaient déclarés Chrétiens et disciples de Christophe.

Il ordonna ensuite d'attacher Saint Christophe par une chaîne à une lourde pierre à moulin et il le fit jeter dans un puits, d'où il fut délivré par un Ange. On le revêtit ensuite d'une cuirasse de bronze rougie au feu, mais le valeureux Martyr resta impassible sous la douleur. Finalement, ayant épuisé les ressources de son imagination perverse, le tyran le fit décapiter, le 9 mai.

Peu après, l'Evêque d'Attalia acheta le corps du Saint Martyr et le transporta avec solennité dans sa cité, dont Saint Christophe devint le protecteur contre les intempéries et les calamités. Son culte s'est très largement répandu au cours du Moyen Age, tant en Orient qu'en Occident.

1). C'est par une interprétation trop littérale du nom donné à cette tribu : Kynoprosopoi ("têtes de chien"), que certains iconographes tardifs ont représenté, à tort, le Saint avec une tête de chien.