SAINT EPIPHANE
Evêque de Salamine
à Chypre

25/05 - 12/05


 
 
Notre Père Saint Epiphane naquit vers l'an 315 (ou 308) dans une modeste famille juive du village de Bésandouch, près d'Eleuthéropolis en Palestine. A la mort de son père, il fut adopté par un docteur de la Loi, Tryphon, qui projetait de lui donner sa fille en mariage. Animé depuis son enfance d'un grand zèle pour l'étude, Epiphane étudia à ses côtés l'Ecriture Sainte et les institutions juives, et acquit la connaissance de cinq langues : le grec, le latin, l'hébreu, le syriaque et le copte, chose fort rare à l'époque.

A la mort de Tryphon, il hérita de toute sa fortune. Un jour, alors qu'il était en train de visiter ses terres et passait à cheval à côté d'un moine chrétien, nommé Lucien, ce dernier, rencontrant un pauvre et n'ayant pas d'argent, se dépouilla de son vêtement pour le lui donner, et aussitôt une robe d'une blancheur resplendissante descendit du ciel pour le couvrir. Ce signe vint confirmer l'admiration qu'Epiphane entretenait pour les Chrétiens depuis que, dans son enfance, il avait été sauvé miraculeusement par l'un d'eux de sa monture emballée. Tombant alors aux pieds de Lucien, il le supplia de le baptiser et de l'accepter dans l'ordre angélique. Baptisé, avec sa soeur, par l'Evêque de la cité, il distribua tous ses biens et devint disciple de Saint Hilarion, dont il suivit avec exactitude, pendant tout le reste de sa vie, la stricte discipline ascétique. Les mystères et les figures de l'Ancien Testament prenant tout leur sens dans la lumière du Christ, il s'adonna avec encore plus d'ardeur à l'étude et, avide de connaître le mode de vie des moines d'Egypte, il entreprit un long voyage dans cette terre d'élection de la vie ascétique. Il s'informa aussi sur les doctrines professées par diverses sectes et hérésies qui y pullulaient, rassemblant ainsi les éléments de son traité monumental contre toutes les hérésies, qu'il rédigera au soir de sa vie. Ayant échappé de peu aux entreprises des Manichéens, il rentra en Palestine, après quatre années, et fonda un Monastère près de son village natal, qu'il dirigea en toute sagesse pendant trente ans. On raconte que, par sa prière, il fit jaillir de l'eau de la terre desséchée et que les cellules des Moines furent construites par des Sarrasins qui avaient été témoins de ses miracles. Par l'invocation du Nom du Christ et grâce à son don de clairvoyance, Epiphane chassait les démons qui tourmentaient les villageois et certains de ses moines. Il délivra aussi la contrée d'un lion redoutable mangeur d'hommes et il répandait largement les aumônes; mais c'était surtout par son charisme d'enseignement et d'interprétation des Ecritures qu'il brillait comme un astre sur toute l'Eglise.

Ayant réalisé le danger que représentait pour l'Eglise la sagesse hellénique, source des multiples hérésies, il s'employa pendant toute sa vie à lutter pour la défense de la vraie foi. On raconte qu'un philosophe célèbre vint d'Edesse au Monastère de Saint Epiphane pour discuter des Saintes Ecritures. Ils débattirent longtemps sur les mystères de la création, Epiphane tenant en main la Sainte Bible et le philosophe les écrits d'Hésiode, et bien que la lumière de la vérité fût éclatante, ce demier restait obstiné. Mais lorsqu'il vit Epiphane guérir un possédé par l'invocation du Nom du Christ, renonçant à la vaine sagesse, il demanda à être baptisé. Il fut ensuite ordonné Prêtre et devint le successeur du Saint à la tête du Monastère.

Ayant quitté son Monastère pour échapper aux honneurs des hommes et parvenu à Chypre, où il eut la grande joie de retrouver Saint Hilarion, Epiphane accepta, sur la pression de ce demier, d'être consacré Evêque de Constantia (Salamine), en 376. Il voyait dans cette élévation non pas une occasion de vaine gloire, mais plutôt un moyen d'échapper aux entreprises des hérétiques semi-ariens fort influents en Palestine. Pendant trente-six ans, il montra un zèle exemplaire dans le gouvernement de son diocèse et la confirmation de la Foi Orthodoxe, tant à Chypre que dans le reste du monde. De nombreux miracles vinrent confirmer de manière éclatante ses vertus pastorales et son amour paternel pour ses ouailles. Sa générosité et ses interventions en faveur de ceux qui étaient victimes de l'injustice lui attirèrent toutefois la haine d'une partie de son clergé, menée par le Diacre Carin, qui l'accusa de dilapider l'argent de l'Eglise. Malgré toutes les entreprises de ce dernier pour diffamer le Saint, Epiphane lui montrait toujours la même bienveillance, et Carin fut finalement châtié par Dieu et périt misérablement.

On raconte que, lorsque le Saint célébrait la Divine Liturgie, il voyait visiblement le Saint-Esprit descendre sur les Dons pour les sanctifier. Un jour, il fut privé de cette vision, à cause de l'indignité de l'un de ses concélébrants; après l'avoir écarté, Saint Epiphane supplia Dieu avec larmes et ne continua la célébration qu'à la suite d'une nouvelle manifestation de la gloire divine. Très attentif à l'intégrité morale de son Clergé, le Saint prélat voulait que ses clercs fussent par leurs vertus un digne ornement pour l'Epouse du Christ; aussi avait-il transformé son palais épiscopal en Monastère, où il menait la vie commune avec plus de soixante-dix Clercs.

En 382, laissant le gouvernement de son diocèse à Saint Philon de Carpathos, Epiphane se rendit à Rome, en compagnie de Saint Jérôme et de Paulin d'Antioche, dans le but de résoudre en faveur de ce dernier le schisme d'Antioche. Ils résidèrent dans la demeure de Sainte Paule, et le biographe du Saint rapporte qu'il fit là d'éclatants miracles et guérit la soeur des coempereurs Arcade et Honorius. De retour à Chypre, lors d'une terrible famine, il distribua à la population le blé qu'il avait acheté aux accapareurs, avec de l'or reçu à la suite d'une vision.

Dans son zèle pour extirper de la théologie chrétienne toute trace d'hellénisme, Saint Epiphane concentra particulièrement ses efforts contre les doctrines d'Origène, alors très en faveur chez les moines de Palestine. En 393, prenant la parole à Jérusalem à l'occasion de la fête de la Dédicace de la basilique de la Résurrection, il proclama qu'Origène était le père de l'arianisme et de toutes les hérésies. Le soir même, le Patriarche Jean, auquel Epiphane reprochait sa sympathie à 1'égard des origénistes, répliqua en attaquant les "anthropomorphistes", c'est-à-dire les adversaires de l'exégèse allégorique de l'Ecriture, prônée par le grand docteur alexandrin. La querelle s'envenima et prit une large ampleur, surtout lorsque Saint Jérôme se rangea aux côtés d'Epiphane contre le Patriarche Jean et son ancien ami, Rufin d'Aquilée. S'éloignant de la cité tourmentée, Epiphane se rendit quelque temps dans son Monastère d'Eleuthéropolis, puis retourna dans son diocèse, sans pour autant abandonner un combat, que son caractère ardent et sa simplicité portaient à des prises de position extrémistes.

Le flambeau de la lutte anti-origéniste passa alors à l'Archevêque d'Alexandrie Théophile (401) qui, précédemment disciple d'Origène, en était devenu un ennemi féroce et implacable, en vue d'assouvir sa rancune contre quatre frères de noble origine (appelés les Frères "Longs", à cause de leur haute taille) qui, préférant l'hésychia aux dignités ecclésiastiques, avaient quitté son clergé sans l'autorisation de Théophile, pour devenir moines à Nitrie. Poursuivis par l'Archevêque, ils se réfugièrent à Constantinople, dans l'espoir d'obtenir gain de cause auprès de Saint Jean Chrysostome. Utilisant cette occasion pour accuser Saint Chrysostome, qu'il jalousait, d'être le protecteur de l'hérésie origéniste, Théophile s'adressa à Epiphane. Mal informé de la situation et des motifs réels de Théophile, le vieil Evêque, pensant partir à la défense de l'Orthodoxie, se rendit à Constantinople, après avoir condamné l'origénisme dans un Synode des Evêques de Chypre. Accueilli avec révérence par Saint Chrysostome, Epiphane refusa ces marques d'honneur; il alla demeurer dans une maison privée et procéda à l'ordination d'un Diacre dans un Monastère. Saint Chrysostome lui fit savoir qu'il était très affligé d'apprendre que son frère dans l'épiscopat avait agi ainsi contre les Saints Canons2 et agitait sans raison le peuple contre son pasteur. Saint Epiphane décida alors de prendre le chemin du retour, afin de ne pas être davantage cause de discorde, et il quitta la capitale peu avant le sinistre Synode du Chêne qui déposa de manière inique Saint Jean Chrysostome (403). Il remit son âme à Dieu pendant la traversée (12 mai 403), après avoir exhorté ses disciples à préserver la pureté de la foi et à se garder de l'attrait des richesses et de la calomnie. A l'arrivée du navire à Salamine, une foule immense, tenant des cierges en main, accueillit son pasteur et l'accompagna avec larmes jusqu'à l'église, où pendant sept jours une grande partie de la population de Chypre vint le vénérer.

Le culte de Saint Epiphane se répandit rapidement et son tombeau reste un des lieux de pèlerinage les plus vénérés de l'île, dont il est le Saint Patron, avec Saint Barnabé.