Art et Histoire des Icônes en Russie du Xe siècle à nos jours

Les origines de la Russie
Les origines
des Icônes

La légende de
Saint Luc

Le culte des icônes

Les principaux symboles
Byzance
Les lieux
de culte :
les églises

Les lieux
de culte :
les maisons

Les écoles
iconographiques
-1-

Les écoles
iconographiques
-2-

Les écoles
iconographiques
-3-

Les écoles
iconographiques
-4-

Théophane
le grec

Andreï Roublev

L'évolution
occidentale

Les reflets de
la Russie :
l'Eglise

Les reflets de
la Russie :
l'armée

Les reflets de
la Russie :
les personnages et les vêtements

Les reflets de
la Russie :
la nature


La Bible chrétienne est composée de deux parties :

- Le Premier Testament, qui est en quelques sorte une "bibliothèque",  où se trouvent des ouvrages très différents. La Loi : Tora, les Prophètes : Neviim, les autres écrits : Ketouvim puis ce que les chrétiens nomment les livres Deutérocanoniques. Tous ces textes sont  lus et commentés depuis le Ve siècle (avant J-C) dans les synagogues car ils forment  la Bible de la religon hébraïque.
Ces écrits (transcrits de la tradition orale) sont l'Alliance entre Dieu et son peuple, et annoncent dans le Livre du Prophète Isaïe, un Messie (en grec "chrestos" : Christ), un sauveur qui viendra proposer une nouvelle alliance entre Dieu et le Monde.

Aux premiers écrits hébraïques les chrétiens, pour qui Jésus est véritablement le Messie annoncé, ont ajouté d'autres ouvrages écrits au premier siècle : Les Évangiles (du grec "evangelion" bonne nouvelle) racontant la vie de Jésus, relatant son enseignement et dont la canonicité fut établie entre le IIe et le IVe siècle.

Quatre évangiles écrits par Jean et Mathieu (compagnons de Jésus) puis par Marc et Luc furent choisis au IVe siècle par l'Église comme étant les narrations les plus réalistes de la vie de Jésus le Christ.
Cependant d'autres textes furent rédigés à la même époque : on les nomme apocryphes (du grec "apokruphos" = tenu secret, et surtout pas "faux" ou "inventés").
Ils  sont encore utilisés par les églises orientales et orthodoxes, comme par exemple, le protoévangile de Jacques apôtre. 
Ainsi des icônes orthodoxes racontent la conception de Marie par Anne et Joaquim, sa naissance et sa présentation au temple, éléments qui ne sont pas mentionnés dans les textes canoniques.

L'ancien Testament interdisait de reproduire l'image de ce qu'on avait jamais vu et surtout de lier un culte quelconque à la forme représentée. La venue sur Terre parmi les hommes du Fils de Dieu a bouleversé cette conception pour les chrétiens : le Messie a pris la forme d'un homme, Jésus de Nazareth. Sa nature humaine est indissociable de sa nature divine. Dans cette logique de l'incarnation, la première icône est Jésus le Christ lui-même : "Qui me voit, voit celui qui m'a envoyé" (Jean 12,19) et "Qui m'a vu, a vu le Père" (Jean14,19).

Pour effectuer une comparaison avec des éléments de notre univers, prenons l'exemple de la photo d'un grand-père disparu, que l'on a beaucoup aimé, avec qui les souvenirs d'enfance sont encore très présents. Le fait de regarder sa photo, son image, son "icône", va remettre en mémoire tous ces souvenirs et rendre ce grand-père plus présent pour quelques instants. Cette image va faire appel à des notions abstraites et impalpables. Il ne viendrait toutefois pas à l'idée de se mettre à adorer le papier et les procédés chimiques qui ont fixé la lumière sur cette surface. Il en est ainsi pour l'icône : la vénération s'adresse à celui qui est représenté. L'honneur rendu à une icône remonte à l'original.

Le culte des icônes connut bien des controverses lors des premiers siècles. Les plus terribles sur le plan humain furent les guerres iconoclastes de l'empire byzantin (voir chapitre "Origines") avant que l'on parvienne à une canonisation des représentations de Dieu et des saints.
Le plus important Concile de reconnaissance, fut celui de Nicée, commencé en 786, qui consacra trois de ses huit sessions à l'approbation du culte. L'image objet de vénération sera classée en deux types :
"Proskynesis schetiké"
ou vénération relative (ou vénération d'honneur) de Marie, mère de Dieu, des saints et des pères de l'Église.
"Latréia"
ou "Latréiotiké proskunesis", adoration réservé à Dieu seul.

Il faudra toutefois attendre l'an 843, après une longue "guerre" cruelle et fratricide de presque 120 ans pour qu'officiellement, sous l'influence de l'impératrice Théodora (Veuve de Théophile Basiléus, ne pas confondre avec Théodora épouse de Justinien Ier, au VIe siècle) et avec le soutien du Patriarche Méthode, soit déclaré légitime le culte des icônes.

Les icônes ont toujours été très symboliques du pouvoir spirituel de l'Église Russe et implicitement du pouvoir impérial. Aussi une grande campagne de destruction eut lieu au début du régime communisme : on "invitait" les gens à venir entasser  toutes les  représentations religieuses sur la place du village pour un grand feu de joie. En mai 2010 on découvrit dans les murs des tours du Kremlin plusieurs icônes qui avaient été recouvertes de plâtre après 1918. L'une d'entre elles est une icône de St Nicolas et daterait du Ve siècle.
Passée cette période dramatique, les icônes russes furent considérées dans leur pays comme un art populaire mineur qui heureusement retint l'attention des restaurateurs et des scientifiques, permettant ainsi de sauver quelques chefs-d'oeuvres.

L'étude des icônes couvre quatre niveaux :

- théologique avant tout car l'icône pour un chrétien est une l'intercession de prière, de communication avec Dieu.
- scientifique, de par la combinaison des matériaux qui en composent la peinture elle-même et son support;
- artistique, dans le sens où la représentation et la description d'un personnage ou d'un événement, les rendent intelligibles au premier regard tout en utilisant des codes éloignés du naturel;
- historique : c'est le côté qui nous interessera le plus sur ce site car jusqu'à la fin du XVIIe siècle, la peinture profane n'était pas autorisée et les seules indices de la vie du peuple russe se trouvaient dans les "vita" des icônes.









Le Patriarche Méthode
portait sur lui-même 

les preuves de sa fidélité
au culte des icônes; 

on le décrivait ainsi :


"Les lèvres mutilées
par le fer des iconoclastes, 

obligé, dans les fonctions publiques de
soutenir ses mâchoires
par des bandelettes blanches

qui devinrent pour ses successeurs
les insignes et la parure
de leur pontificat,

il conservait assez de
verve et de voix

pour dicter ses hymnes
et ses discours,

toujours  redoutables
aux ennemis des images."


La fête du
"Dimanche de l'orthodoxie"
consacre l'image sainte
A gauche l’impératrice Théodora
et son fils Michel III enfant
à droite, Méthode
grand patriarche de Constantinople.



©Marie Deriglazoff-2000 à 2010-