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Art et Histoire des Icônes en Russie
du Xe siècle à nos jours |
NOVGOROD Quand, au milieu du XIe siècle, André Bogolioubski, prince de Rostov-Souzdal, installe la capitale de la Russie à Vladimir, à un millier de kilomètres au nord de Kiev qu'il a détruit, il se rapproche d'une vieille rivale turbulente : Novgorod. L'art iconographique particulier de Vladimir restera attaché à la tradition byzanto-kiévienne malgré une "russification" timide dans le choix de couleurs vives, les contrastes et l'intensité des carnations. En 1204, la Russie est coupée brutalement de l'influence byzantine par la prise de Constantinople par les croisés. En 1236, les mongols font fuir vers le nord les populations et les religieux, principalement vers deux villes encore épargnées : Pskov et Novgorod. Depuis 1136 cette cité aux confins des territoires
kiéviens, a chassé son prince; elle est gouvernée
par des assemblées (les vétchés) de notables et
de marchands et elle élit son propre archevêque. Elle est
très riche et fière de son indépendance; on
l'appelle "Le Grand Souverain Novgorod" (le mot ville en russe est
du genre masculin) et continue les traditions kiéviennes sur une
grande échelle; elle a depuis longtemps ses propres architectes,
ses peintres, ses écrivains laïques ou religieux (les archevêques
Moïse et Basile), et ses chroniqueurs. Ce foyer artistique anti-conservateur, en perpétuel développement, va imposer dans les compositions iconographiques la vivacité des couleurs, privilégier les contours par rapport aux volumes et éclaircir les carnations vers des tons plus bruns que les teintes olivâtres des visages grecs. La seconde vague des offensives mongoles qui touchera le nord de la Russie, influencera directement l'art novgorodien à qui on doit la création et le développement des iconostases et par là même les compositions de grande taille. Les envahisseurs ayant la fâcheuse habitude de brûler tout ce qui leur tombait sous la main, il fallait pour sauver les peintures religieuses les oter très rapidement et les cacher aussi vite. Contrairement aux fresques qui brûlaient aussi vite que les murs, les panneaux de bois peints amovibles avaient l'énorme avantage de s'enlever rapidement et d'être dissimulés dès que l'on entendait retentir le galop des chevaux tatars. Le second avantage était du à la matière première : le bois était présent partout, alors que les pierres, mortiers et enduits nécessaires à la construction et à la réalisation des fresques étaient coûteux et longs à faire venir sur place. L'âge d'or de la ville se termina avec la fin des Apanages. En 1471, elle ne put résister à Ivan III qui ne pouvait laisser se développer une telle puissance si proche de Moscou et qui semble-t-il avait la préférence des classes artisanales moyennes de Novgorod. Les artistes et les iconographes prirent le chemin de la nouvelle capitale qui était devenue métropole religieuse en 1326 sous le règne d'Yvan Kalita. Après le saccage de Kiev en 1169 par André Bogoliouski, les princes de la Russie s'établirent définitivement dans les villes du nord et du nord-est. La période des apanages et la domination mongoles mirent fin à la puissance économique et culturelle de Kiev. Elle demeura néanmoins, autant que possible après tant de pillages et de tueries, le centre religieux pour les populations slaves orientales et méridionales. La nation ukrainienne rassembla au XIIIe siècle plusieurs territoires : la Volynie au nord-ouest, la Galicie au sud, la Podolie et la Bukovine au sud-ouest. A partir du XIVe siècle, l'Ukraine se retrouve dans la sphère d'influence territoriale de puissants voisins : la Pologne, la Lituanie et la Hongrie qui parvenaient à résister à la Horde d'Or. Malgré les partages de terres dont ils furent victimes, les ukrainiens résistèrent aux influences culturelles et surtout catholiques de leurs envahisseurs et Lvov devient la capitale artistique.
Si l'on retrouve de nos jours de plus en plus d'icônes du
XIIIe siècle dans différentes
régions d'Ukraine, il n'en est pas de même pour Kiev.
La seule qui soit parvenue jusqu'à nous l'est sous forme de photographie.
Enlevée par les nazzis pendant l'occupation,
elle n'a toujours pas été retrouvée à
ce jour.
Icône de La Dormition
région de Lvov, fin du XVIe siècle, de l'église Sainte-Parascève-Piatnitsa de la ville de Skolié. Actuellement au Musée National de Lvov. L'influence de l'art occidental commence à être perceptible : les modelés des visages s'éloignent des canons iconographiques classiques et l'arrière plan est traité de façon décorative. |
Icône La passion du Christ
quadripartite-fin du XVe siècle Chaque scène mesure 24cm x 19,5cm Les couleurs riches accentuent les contours marqués du dessin et les arrières-plans simples ont une utilité dans la précision de la transcription du récit des évangiles. La particularité des icônes russe est désormais achevée et l'icône descriptive est courante. Ici les quatre parties racontent les principaux moments de la passion du Christ et sa crucifixion. Désormais caratéristiques de l'iconographie russe, se trouvent mêlés les éléments contemporains du peintre et les éléments bibliques : les soldats romains portent des casques médiévaux russes et les personnages qui fouettent Jésus, sont habillés courts et chaussés à la russe avec un manteau drapé à la romaine Vierge Hodiguitria |
Icône de La Dormition, XIIIe siècle, provient
Déisis de la fin du XVe siècle. Actuellement
au Musée National
La Vierge de la Confrérie |