Art et Histoire des Icônes en Russie du Xe siècle à nos jours

Les origines de la Russie
Les origines
des Icônes

La légende de
Saint Luc

Le culte des icônes
Les principaux symboles
Byzance
Les lieux
de culte
:
les églises

Les lieux
de culte :
les maisons

Les écoles
iconographiques
-1-

Les écoles
iconographiques
-2-

Les écoles
iconographiques
-3-

Les écoles
iconographiques
-4-

Théophane
le grec

Andreï Roublev

L'évolution
occidentale

Les reflets de
la Russie :
l'Eglise

Les reflets de
la Russie :
l'armée

Les reflets de
la Russie :
les personnages et les vêtements

Les reflets de
la Russie :
la nature


NOVGOROD

Quand, au milieu du XIe siècle, André Bogolioubski, prince de Rostov-Souzdal,  installe la capitale de la Russie à Vladimir, à un millier de kilomètres au nord de Kiev qu'il a détruit, il se rapproche d'une vieille rivale turbulente : Novgorod. L'art iconographique particulier de Vladimir restera attaché à la tradition byzanto-kiévienne malgré une "russification" timide dans le choix de couleurs vives, les contrastes et l'intensité des carnations.

En 1204, la Russie est coupée brutalement de l'influence byzantine par la prise de Constantinople par les croisés. En 1236, les mongols font fuir vers le nord  les populations et les religieux, principalement vers deux villes encore épargnées : Pskov et Novgorod. 

Depuis 1136 cette cité aux confins des territoires kiéviens, a chassé son prince; elle est gouvernée par des assemblées (les vétchés) de notables et de marchands et elle élit son propre archevêque. Elle est très riche et  fière de son indépendance; on l'appelle "Le Grand Souverain Novgorod" (le mot ville en  russe est du genre masculin) et continue les traditions kiéviennes sur une grande échelle; elle a depuis longtemps ses propres architectes, ses peintres, ses écrivains laïques ou religieux (les archevêques Moïse et Basile), et ses chroniqueurs. 
Des chercheurs soviétiques ont découvert des centaines de notes commerciales ou de courts messages, gravés sur des écorces de bouleau. Le plus ancien manuscrit russe découvert à ce jour "L'Evangile d'Ostromir" du XIe siècle, quoique de facture kiévienne, a été rédigé et enluminé à Novgorod. Seront invités à venir travailler à Novgorod de nombreux peintre grecs dont le moine Théophane (qui fera l'objet d'une étude particulière).

Ce foyer artistique anti-conservateur, en perpétuel développement, va imposer dans les compositions iconographiques la vivacité des couleurs, privilégier les contours par rapport aux volumes et éclaircir les carnations vers des tons plus bruns que les teintes olivâtres des visages grecs.

La seconde vague des offensives mongoles qui touchera le nord de la Russie, influencera directement l'art novgorodien à qui on doit la création et le développement des iconostases et par là même les compositions de grande taille. Les envahisseurs ayant la fâcheuse habitude de brûler tout ce qui leur tombait sous la main, il fallait pour sauver les peintures religieuses les oter très rapidement et les cacher aussi vite. Contrairement aux fresques qui brûlaient aussi  vite que les murs, les panneaux de bois peints amovibles avaient l'énorme avantage de s'enlever rapidement et d'être dissimulés dès que l'on entendait retentir le galop des chevaux tatars. Le second avantage était du à la matière première : le bois était présent partout, alors que les  pierres, mortiers et enduits nécessaires à la construction et à la réalisation des fresques étaient coûteux et longs à faire venir sur place.

L'âge d'or de la ville se termina avec la fin des Apanages. En 1471, elle ne put résister à Ivan III qui ne pouvait laisser se développer une telle puissance si proche de Moscou et qui semble-t-il avait la préférence des classes artisanales moyennes de Novgorod. Les artistes et les iconographes prirent le chemin de la nouvelle capitale qui était devenue métropole religieuse en 1326 sous le règne d'Yvan Kalita.

L'ECOLE UKRAINIENNE

Après le saccage de Kiev en 1169 par André Bogoliouski, les princes de la Russie s'établirent définitivement dans les villes du nord et du nord-est. 
La période des apanages et la domination mongoles mirent fin à la puissance économique et culturelle de Kiev. Elle demeura néanmoins, autant que possible après tant de pillages et de tueries, le centre religieux pour les populations slaves orientales et méridionales.

La nation ukrainienne rassembla au XIIIe siècle plusieurs territoires : la Volynie au nord-ouest, la Galicie au sud, la Podolie et la Bukovine au sud-ouest. 

A partir du XIVe siècle, l'Ukraine se retrouve dans la sphère d'influence territoriale de puissants voisins : la Pologne, la Lituanie et la Hongrie qui parvenaient à résister à la Horde d'Or. Malgré les partages de terres dont ils furent victimes, les ukrainiens résistèrent aux influences culturelles et surtout catholiques de leurs envahisseurs et Lvov devient la capitale artistique.

Si l'on retrouve de nos jours de plus en plus d'icônes du XIIIe siècle dans différentes régions d'Ukraine, il n'en est pas de même pour Kiev. La seule qui soit parvenue jusqu'à nous l'est sous forme de photographie. Enlevée par les nazzis pendant l'occupation, elle n'a toujours pas été retrouvée à ce jour.
Le XVIe siècle vit ressurgir une élite religieuse et artistique autour du monastère des Grottes de Kiev et dès le XVIIe siècle la Russie rétablit progressivement son emprise sur ces territoires jusqu'au XXe siècle.
Si l'iconographie sut rester traditionnelle jusqu'au XVIe siècle en gardant un style très particulier influencé par les traditions populaires, elle suivit plus fortement en premier les influences occidentale.


Icône de La Dormition

région de Lvov, fin du XVIe siècle, de l'église Sainte-Parascève-Piatnitsa de la ville de Skolié. Actuellement au Musée National de Lvov.

L'influence de l'art occidental commence à être perceptible : les modelés des visages s'éloignent des canons iconographiques classiques et l'arrière plan est traité de façon décorative.





Icône La passion du Christ

 quadripartite-fin du XVe siècle

Chaque scène mesure 24cm x 19,5cm
Les couleurs riches accentuent
les contours marqués du dessin et les arrières-plans simples ont une utilité dans la précision de la transcription
du récit des évangiles.
La particularité des icônes russe
est désormais achevée et l'icône descriptive est courante.
Ici les quatre parties racontent les principaux moments de la passion du Christ et sa crucifixion.
Désormais caratéristiques
de l'iconographie russe,
se trouvent mêlés les éléments contemporains du peintre et les
éléments bibliques : les soldats
romains portent des casques médiévaux russes et les personnages qui fouettent Jésus, sont habillés courts et chaussés
à la russe avec un manteau drapé à la romaine



Vierge Hodiguitria
de la seconde moitié du XIVe siècle.
Origine Volynie : église de l'Annonciation de Loutsk, aujourd'hui au Musée d'art National de Kiev.
Considérée comme miraculeuse,
elle offre la particularité d'avoir quatre étoiles sur le manteau de la Vierge contrairement aux trois traditionnelles.



   

Icône de La Dormition,

XIIIe siècle, provient
du monastère
de la Dîme à Novgorod,
mentionné dans
"Les Chroniques " en 998.
Cette peinture kiévienne et
ne cachant pas ses canons
byzantins, laisse toutefois
apparaître
un modelé des visages
déjà typiquement russe. 
Les drapés des vêtements sont plus
souples que dans les icônes grecques
et les attitudes des personnages
se rapprochent de positions
nettement plus humaines,
moins raides
et moins figées que
les modèles byzantins.


Déisis de la fin du XVe siècle. Actuellement au Musée National
de Lvov,
elle provient de l'église de La-Nativité-de-la-Vierge de la ville de Starytcha. 
Le christ est représenté debout et les deux autres personnages (Marie et Jean le Précurseur) sont de très petite taille :
à peine la hauteur du visage de Jésus, contrairement aux déisis plus classiques où les les trois ont des proportions quasi-équivalentes.




La Vierge de la Confrérie
mi-XVIIIe siècle, panneau de
l'iconostase de l'église de la Trinité, située dans la porte d'enceinte de la
Laure (monastère) des Grottes de Kiev.

On est loin ici des canons iconographiques : les visages sont
traités comme ceux des peintures classiques occidentales, les drapés
des vêtements sont sont souples et fondus, quant aux anges représentés
aux pieds de la Vierge, ils n'ont plus rien à voir avec les chérubins à quatres ailes de l'iconographie russe.



©Marie Deriglazoff-2000 à 2010-