Art et Histoire des Icônes en Russie du Xe siècle à nos jours

Les origines de la Russie
Les origines
des Icônes

La légende de
Saint Luc

Le culte des icônes
Les principaux symboles
Byzance
Les lieux
de culte
:
les églises

Les lieux
de culte :
les maisons

Les écoles
iconographiques
-1-

Les écoles
iconographiques
-2-

Les écoles
iconographiques
-3-

Les écoles
iconographiques
-4-

Théophane
le grec

Andreï Roublev

L'évolution
occidentale

Les reflets de
la Russie :
l'Eglise

Les reflets de
la Russie :
l'armée

Les reflets de
la Russie :
les personnages et les vêtements

Les reflets de
la Russie :
la nature


L'icône comme toute chose a de nombreux ancêtres, aussi variés que peuvent être les aïeux du petit dernier dans chaque famille.

Parmi les grands parents les plus lointains, on trouvera les représentations des dieux chez les grecs dont certaines statues étaient dites "non faites de main d'homme" (achéropoiètes) comme l'Artémis d'Ephèse, descendue du ciel et parée de fleurs et de parfums.
Platon voyait le danger de telles superstitions mais concevait que l'homme cultivé puisse tout à fait participer aux célébrations afin de plaire aux dieux et ainsi cotoyer les gens simples qui ont besoin des images concrètes du divin.

Les grands parents maternels, dirons-nous, ont été de grands voyageurs dans le monde gréco-romain et ont laissé leurs plus belles traces en Egypte : les portraits funéraires.

Dans la parenté également très proche, la famille des fresques : les fresques étrusques aux délicates représentations humaines, les fresques du peuple juif, puis celles des romains (Pompéï). Certes, Dieu, dans l'Ancien Testament interdit son image mais les représentations figuratives ne sont pas totalement prohibées dans la religion juive des premiers siècles.

Chez les chrétiens ensuite, la légende de Saint Luc donne une naissance officielle à l'art des icônes de la Vierge Marie, portraits prétendument exécutés d'après nature. Quelques siècles plus tard les modèles byzantins deviendront la référence de la peinture d'icônes;  des canons stricts furent édictés au cours des premiers conciles de l'Eglise et s'appliquèrent à toutes les formes d'art sacré.

Les portraits funéraires

Les portraits dits du Fayoum sont un véritable miracle archéologique. Les plus nombreux ont effectivement été retrouvés dans l'oasis du Fayoum mais divers autres sites révèlèrent quelques trésors, à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest des bords du Nil et à une centaine de kilomètres au sud du Caire. Préservées par les sables et le climat sec du désert, on retrouva, dès la fin du XIXe siècle, des momies parfaitement conservées datant, pour les plus anciennes, de la dynastie des Ptolémées et pour les plus récentes du IVe siècle après J-C.
Cet art du portrait amené par les grecs et perpétué par les romains devait prendre fin sous cette forme avec le règne de Théodose (379-395), par l'instauration du christianisme comme religion d'état et l'interdiction des cultes païens. Le corps "enveloppe" n'est plus nécessaire à la survie de l'âme, ainsi sa conservation revêt moins d'importance. Les portraits étaient peints du vivant de l'individu, placés après sa mort sur sa momie, à la hauteur du visage et maintenu par les bandelettes de l'embaumement.  De nos jours nous avons l'habitude de contempler ces images séparées de leurs support et de les considérer comme des tableaux indépendants.
La qualité de l'exécution, qui peut aller de la quasi perfection photographique à un barbouillage bâclé, est semble-t-il la conséquence de l'aisance matérielle des familles :  les dépenses de momification étant coûteuses, les économies se faisaient au détriment du portrait et donc de la qualité du peintre engagé. Concrètement parlant, les premiers iconographes reprirent les mêmes techniques pour réaliser les premières icônes. Exécutés la plupart du temps sur de minces plaques de bois, plus rarement sur de la toile de lin, les portraits sont réalisés à la cire chaude. On mélange des pigments naturels broyés finement (des terres, des argiles dont l'Égypte regorgeait sur les rives du Nil)  à de la cire d'abeille que l'on maintient à la chaleur le temps nécessaire. Le produit maintenu sous forme "liquide" est posé par petites touches avec un stylet au manche de bois. L'exécution doit être très rapide car même sous des chaleurs africaines, la cire refroidit vite. Les visage sont le plus souvent de face, quelques fois de trois-quarts, comme ils le seront plus tard dans les icônes chrétiennes.

Les fresques

Si certains auteurs ignorant l'histoire du bassin méditerranéen, se réfèrent exclusivement aux fresques des catacombes pour situer la naissance de l'iconographie chrétienne, il est pourtant nécessaire de remonter un peu plus loin dans le temps et s'arrêter devant les fresques de l'art juif car les premières représentations du Christ y trouvent leurs racines.
On trouve dans la Bible, plus exactement dans le livre de l'Exode (20,1-5) l'interdiction suivante : "Tu ne feras pas d'idole, ni rien qui ait la forme de ce qui se trouve au ciel là-haut, sur terre ici-bas ou dans les eaux sous la terre."  ou bien encore  (34,17) "Tu ne feras pas de dieux en forme de statue". Il s'agit en réalité d'éviter que le Peuple Elu ne retourne à une religion plurithéiste dont il avait eu le modèle sous les yeux en Égypte, ou ne s'oriente vers une religion animiste. Le seul Dieu unique doit être adoré pour son existence et non par son apparence dans une image altérée par l'homme.
La Bible donnera cependant des instructions précises des images autorisées : le serpent d'airain, les chérubins de l'Arche d'Alliance renfermant les tables de la  Loi, et lors de l'édification du temple de Jérusalem : des palmiers, des chérubins à faces d'hommes et des lions. Les rejets les plus violents de toutes les illustrations eurent lieu à l'époque où le judaïsme se voyait menacé par l'hellénisme (332 av.J-C), puis à la période d'occupation romaine où les représentations omni-présentes des empereurs assimilés à des dieux étaient un affront permanent au monothéïsme hébreux.

Le monde juif en général fit preuve d'une grande liberté vis à vis des images: les illustrations de l'Ancien Testament couvraient les murs des synagogues. Elles sont d'autant plus intéressantes qu'elles sont d'un esthétisme étranger à la tradition romaine omniprésente dans le bassin méditerranéen.
Les fouilles archéologiques permettent quelquefois de retrouver des morceaux de murs peints,des mosaïques ou de simples dessins mais la plus importante découverte date de 1932. En Syrie, à Doura-Europos, on découvrit une synagogue édifiée au IIIe siècle.
Les fresques en bon état de conservation représentent des scènes bibliques. On notera dans les gestes des personnages des éléments qui deviendront des graphismes classiques de l'iconographie :  des mains recouvertes par le vêtement signifie l'adoration et l'humilité, les bras relevés et les mains levées au ciel signifient la prière et la béatitude. On retrouve également le drapé et les plis des manteaux ou des tuniques qui seront ceux des personnages des icônes byzantines classiques.

Habitués ainsi à l'ornementation de leur lieu de culte, les premiers convertis continuèrent cet art de la fresque en osmose avec les civilisations grecques et romaines pour décorer les murs des maisons ecclésiales chrétiennes. Les historiens iconographes considèrent l'art de la fresque comme étant l'origine même de l'icône. Tous les types iconographiques se sont formés sur les murs et secondairement dans les manuscrits.
Les première icônes seraient en quelque sorte "descendues des murs" et ainsi se seraient répandues de par le monde méditerranéen grâce aux premiers pèlerins chrétiens de Jérusalem. Ils ramenaient chez eux des flacons en poterie contenant de l'huile sainte, sur lesquels étaient peintes les reproductions des fresques et mosaïques admirées dans les lieux de culte.






















Portraits à la cire chaude
dits "du Fayoum"








Intérieur de la
synagogue de Doura






Femme avec
le Chiton








IIIe siècle










Trône





Représentation
d'Abraham.
Ses mains sont recouvertes.

©Marie Deriglazoff-2000 à 2010-